Une équipe de chercheurs de l’université Paris-Sud ont postulé à près de 800 offres d’emploi avec des profils de candidats fictifs. Le but était de mesurer l’impact des profils Facebook de ces candidats sur les réponses des recruteurs. Les profils indiquant une origine étrangère ont reçu jusqu’à deux fois moins de réponses que les autres profils.
Depuis l’avènement de Facebook en 2004, les candidats se posent régulièrement la question : est-ce-que les recruteurs consultent le profil des personnes qui postulent au sein de leur entreprise ? Plusieurs études ont déjà démontré l’importance du profil Facebook des candidats, notamment sur le rôle négatif qu’il pouvait jouer. En effet, les recruteurs ne vont pas sur Facebook pour se renseigner sur les compétences professionnelles des postulants, mais pour avoir un aperçu du mode de vie de ce dernier. Un profil Facebook négatif peut donc vous jouer des tours !
837 candidatures envoyées avec de faux profils
Jusqu’à présent, seules existaient des études déclaratives, les recruteurs pouvaient donc minimiser l’impact du réseau sur leurs processus de recrutement. C’est pour cela que des chercheurs de l’Université Paris-Sud ont mis en place une expérience dans des conditions réelles. Entre mars 2012 et mars 2013, ils ont répondu à 837 offres d’emploi publiées sur Pôle Emploi avec deux CV de candidats fictifs. Les deux profils de candidat sont identiques : âge, sexe, compétences, adresse, diplômes, expériences et noms d’origine française. Rien ne pouvait donc les différencier en terme de candidatures.
En revanche, leurs deux profils Facebook paramétrés sur la visibilité publique variaient. Le premier candidat indique être né à Brive-la-Gaillarde et parler italien, tandis que le second affichait comme lieu de naissance Marrakech et comme langue parlée l’arabe marocain.
L’écart de réponses positives peut atteindre 55,7%
Les résultats de ces candidatures sont frappants : le candidat né à Marrakech a reçu un taux de réponses positives de 13,4%, contre 21,3% pour l’autre candidat. A partir du mois d’octobre, le test se poursuit avec des candidats moins expérimentés, pour juger si l’ancienneté pouvait compenser la discrimination sur l’origine. Dans ce cas-là, l’écart se creuse : 7,1% de réponses positives pour le candidat d’origine marocaine, contre 16% pour son homologue.
En décembre 2012, Facebook change la présentation des pages profils de ses membres. Seule la ville d’origine apparaît au premier coup d’oeil, tandis que les langues parlées apparaissent seulement dans un sous-onglet. L’étude montre alors que l’écart entre les candidats se réduit considérablement à ce moment-là. Dans le graphique ci-dessous, les pointillés indiquent la date du changement d’affichage des profils sur Facebook. La ligne bleu représente le taux de candidature du candidat de Marrakech, et la ligne rouge les retours du candidat de Brive.
Facebook influe dans le recrutement, l’origine ethnique aussi…
Cette étude a donc utilisé la discrimination pour montrer l’impact de Facebook sur les processus de recrutement des entreprises. “L’étude a utilisé la discrimination comme un moyen indirect pour montrer l’usage de Facebook par les recruteurs”, un champs peu exploré jusque là, précise Nicolas Soulié, co-auteur de l’étude. Facebook joue un rôle toujours aussi important dans le recrutement, notamment en ce qui concerne le contrôle du mode de vie des candidats. Autre enseignement de l’étude, la discrimination à l’embauche sur le critère de l’origine ethnique est toujours aussi présent.